- Article rédigé avec Lorraine de Fierlant dans lecho.be - Carte blanche disponible ici.
Si les partis politiques se concentrent surtout à souligner ce qui les différencie en période électorale, ce ne sont pourtant pas les défis nécessitant des solutions communes qui manquent… Tel est l’objectif de cette série d’articles: tenter d’apporter au-delà des clivages idéologiques et politiques des réponses concrètes aux problèmes les plus pressants. Tous les quinze jours, par groupe de deux ou trois, des politiques aux sensibilités différentes, qui incarnent la génération montante, s’essayent à penser ensemble des sujets aussi brûlants que l’avenir de l’Europe, les conditions d’un enseignement performant, les enjeux climatiques et de mobilité, la révolution du travail et le revenu universel ou encore les conditions d’une bonne gouvernance politique.
La première est échevine à Schaerbeek (LdB); le second est président des jeunes cdH. Ils écrivent à titre personnel.
Le caractère obligatoire de l’école ne suffit plus aujourd’hui pour que les élèves s’investissent dans le parcours scolaire. Du fait de la mutation profonde des constellations familiales et de la révolution dotcom, l’élève découvre déjà très jeune le goût de l’indépendance et les outils qui lui permettent de s’épanouir en dehors du cadre scolaire.
Moi, élève, à 6, 11, 16 ans, je voyage et découvre le monde, j’ai accès à l’information et aux cursus en ligne, je parle à mes amis en permanence sur les réseaux sociaux, je gagne mon argent de poche facilement grâce à un monde du travail en pleine uberisation et un accès facile aux jobs d’étudiant. Alors pourquoi irais-je à l’école? Comment me préparer au mieux au monde demain?
Pour faire face à cette question et répondre à ces mutations systémiques, les méthodes d’apprentissages basées uniquement sur les connaissances sont dépassées. Des réformes importantes sont capitales et nous pensons qu’elles doivent aller dans le sens des deux grands chantiers.
Chantier 1: Transmettre autrement et transversalité
L’école de demain osera une nouvelle approche de transversalité entre les matières et de la transmission entre l’élève et son professeur. Le temps où ce dernier ne transmettait qu’uniquement son savoir et des théories est révolu.
La transmission devient quelque chose de beaucoup plus intime, osons le mot. Il s’agit d’éveiller chez l’élève la richesse et la détermination qui sont déjà en lui. L’apprentissage de la matière coulera ensuite de source, toujours guidé par le professeur. Le rôle du professeur est bien sûr de posséder la matière, l’aliment, mais surtout de maîtriser la recette, la méthode, qui fera que l’élève non seulement l’intègre, prenne plaisir et s’en souvienne.
Cette nouvelle manière de transmettre et de transversalité demande des aptitudes particulières. Elles ne tombent pas du ciel. Trois pistes peuvent aider très concrètement.
Premièrement, il convient d’explorer de nouvelles méthodes pédagogiques. Il y a bien sûr la pédagogie par projets transversaux notamment, où l’élève est auteur de sa propre matière. Mais chaque élève a ses modes d’apprentissage et ses propres capacités. Il convient fort logiquement de prendre en compte ces différences, les progrès effectués dans les nouvelles technologies permettent aujourd’hui de proposer des rythmes et des approches différents.
Le numérique est bien sûr le second outil qui doit être au service du professeur. Ce dernier doit être formé à cet effet. Il convient de prévoir de vrais cours et formations au numérique et à la pédagogie liée au numérique.
Finalement, l’intelligence collective doit aussi devenir la norme dans l’enseignement. Comme partout, le partage d’expériences, de vécus, d’échecs et de réussites avec les autres professeurs est essentiel.
Chantier 2: Culture managériale de l’école
L’autonomie, et la confiance qu’elle présuppose, sont des facteurs essentiels de motivation pour un professeur/directeur compétent qui a suivi un parcours académique poussé. Ils stimulent sa créativité et le sentiment de responsabilité. La confiance doit être le mot-clé de l’école, et l’autonomie des établissements son principe de base.
Qui dit confiance et autonomie, dit aussi responsabilité et évaluation. Évaluation des professeurs par le directeur de l’école. Lui seul y est suffisamment engagé pour se rendre compte des éléments particuliers à chaque situation. Logiquement alors, il revient aux Pouvoirs Organisateurs et aux pouvoirs publics d’accompagner (faisons plus qu’inspecter) et de contrôler les directions d’école. Celle-ci se fera principalement sur les résultats des élèves, laissant aux directions l’autonomie pour y arriver.
Dans la même logique, laissons aux directions d’établissement, une grande autonomie de recrutement et de gestion de son personnel. La direction d’école doit avoir les mains libres pour composer son corps professoral comme elle le sent, et pour arriver à son objectif et en porter la responsabilité.
Afin d’endosser ce rôle de CEO d’école, offrons dès lors aux directions d’école une vraie formation universitaire en RH, gestion, outils informatiques poussés, créativité, gestion de projets. Revalorisons financièrement ce poste en adéquation avec ces nouvelles compétences et responsabilités.
La fin des inspections classiques, abordée au point précédent, ne signifie évidemment pas qu’aucun cadre ne doit être respecté. Mais c’est la direction qui veillera à l’intelligente et l’efficace dispense des cours effectuée par le professeur et respect des programmes de cours.
À cet égard, complémentairement au travail d’équipe, une véritable évaluation par les pairs a certainement son sens dans un établissement scolaire. Cette méthode et d’autres, inspirées du management libéré, doivent petit à petit être introduite dans l’école. La direction y a évidemment un rôle prépondérant.
"Notre progrès en tant que nation ne dépendra que de nos progrès en matière d’éducation", savait déjà John F. Kennedy. L’enseignement est essentiel face aux mutations permanentes du monde, il est donc urgent d’adapter notre enseignement pour relever les défis de demain.
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